Curateur, ce nouveau métier du monde de l’art

Jeunes, proches des artistes, surinformés, férus d’Internet, les curateurs « conceptualisent » des expos. Au Palais de Tokyo, une vingtaine d’entre eux ont carte blanche.

Par Laurent Boudier

Publié le 06 juillet 2013 à 00h00

Mis à jour le 08 décembre 2020 à 05h02

To be or not to be a curateur ?

To be or not to be a curateur ? Impossible, depuis quelques années, d’échapper à ce mot, passablement abscons pour le néophyte largué, mais qui, en animal curieux, s’épanouit partout dans la jungle touffue de l’art contemporain.

Ce qui peut mener à de surréalistes – et snobissimes – conversations, du genre : « Ce curateur a curaté à merveille l’exposition… »

Eclairons la chose : le mot nous vient de l’anglais to cure qui dérive lui-même du latin curare (« prendre soin ») ; il désigne désormais l’action de bâtir une exposition, en dehors des chemins battus et, pour le curateur, celle de repérer et de propulser de jeunes artistes inconnus.

Naïf, on observera que ce fut et demeure a priori le job du commissaire d’exposition ou encore du critique d’art. Or, si « curateur » est un nouveau mot, il s’agit aussi d’un nouveau concept.

prodige de Skype et des réseaux sociaux,

Trentenaire assumé, enfant prodige de Skype et des réseaux sociaux, Easyjetteur et jet-setteur, le curateur est surtout « supra-informé » à force de fréquenter les ateliers d’artistes, les galeries émergentes de Berlin et d’Istanbul, les multiples foires, de Bâle à Mexico, ou les allées des biennales de Venise ou d’Honolulu.

En un mot, il est un électron libre. Sans musée, sans attache – souvent sans argent – mais rempli d’idées.

Nouvelles Vagues

Retrouvez nos expositions préférées de Nouvelles Vagues : Artesur, un cadavre exquis démarré sur le web, Bruissements, un assemblage poétique d’œuvres touchantes, ou le drôlatique projet de Charles Avery à la galerie Perrotin. Sans oublier Condensation, en collaboration avec Hermès.


Palais de Tokyo

Ce qui mit la puce à l’oreille au Palais de Tokyo, qui a concocté « Nouvelles vagues », une intense opération de casting tous azimuts, fondée sur un appel à projets.

Plus de cinq cents jeunes curateurs et curatrices internationaux ont soumis leur proposition à un jury sélect qui en a filtré vingt et un pour ce parcours d’été.

Razzia sur l’art émergent, « Nouvelles vagues » fait tache d’huile en se répandant dans la ville, puisque plus d’une trentaine de galeries parisiennes ont aussi programmé des expositions conceptualisées par de jeunes têtes chercheuses.

Oxygénation

« C’est un vrai mouvement d’oxygénationqui aborde de nouveaux artistes et de nouvelles pensées de l’art contemporain, bien loin du marché ou de l’institution, constate Jean de Loisy, directeur du Palais de Tokyo.

Compagnons

Les curateurs sont les compagnons complices des artistes. Ensemble, ils s’engagent, dialoguent ou perturbent la ligne des chemins habituels de l’art. »

Conçu comme un parcours, des salles obscures en sous-sol jusqu’aux cimaises sous verrière, ce circuit, malgré son allure de patchwork de propositions assez hétéroclites, permet de belles découvertes .

La Machine Ada, dédiée à Ada Lovelace (1815-1852), fille de lord Byron et mathématicienne anglaise à la vie tumultueuse, créée par le duo américain Conrad Shawcross et Ken Farmer ; la montagne de bois Concert Hall, sculpture participative du groupe d’artistes bricoleurs, récupérateurs et musiciens, emmené par le Franco-Américain Jean Barberis

Scènes Turque

Ou encore les nouveaux talents des scènes turque, coréenne ou sud-africaine. Volontairement touffue, mêlant le concept ultrasignifiant et le solo show, « Nouvelles vagues » entend, du récit intime au film, de l’installation à l’acte participatif, nous faire entrer dans le grand bain de l’art et des curateurs de demain.