Terre Paysage 14 - au centre verre bleu et à l'extérieur la céramique
Michèle Jarnoux, les filiations secrètes de la matière
« Je souhaite sortir des sentiers, rechercher l’émotion par l’innovation. »
 

Les sculptures de Michèle Jarnoux mixent la céramique et le verre fusionné, deux matières particulièrement indociles qui nécessitent l’expertise manuelle et la patience.

Amoureuse de la nature, ses travaux témoignent de la préservation de l’environnement et du monde marin, redonnant à la nature son relief et ses particularités. C’est un rêve en devenir, tendu des profondeurs de la mer vers le ciel.

Dédiée entièrement à la sculpture depuis 2011, sa démarche artistique se fonde sur la recherche de la transformation de la matière. Sans modèle, ni dessin au préalable, l’artiste se laisse porter par son imaginaire. La forme nait de ses mains. Accident et contrôle s’influencent, se répondent et font sens ensemble.

 

« Je visualise mon travail et mes mains sculptent. Mes doigts sont mes yeux. »

Sa première série intitulée Empreintes et Variations qu’elle élabore de 2011 à 2013 donne naissance à des personnages sortant de la roche, à la limite de l’abstraction. Puis sa série Mémoires de la Mer illustre en 2013 ses recherches sur les effets de la matière texturée évoquant le corail et de l’association du verre et de la céramique.

Une découverte de 2020 née d’un heureux hasard que l’artiste analyse et maitrise depuis, rassemble au centre de la sculpture le verre qui mousse comme l’écume. L’effet est particulièrement surprenant et réussi. Ce surgissement d’une part de merveilleux est une véritable expérience au cœur de la matière.

Michèle créée en volume son ressenti de la nature et offre une véritable vision sculpturale. Prête à défier les obstacles techniques de la matière, elle affronte les filiations possibles du verre et de la céramique.

« Les taux de contractilité de la céramique et du verre sont totalement différents :  la céramique se retreint . Le verre se colle à la céramique, tandis que l’argile fait s’évaporer l’eau et continue à se réduire jusqu’à son refroidissement, pouvant briser la céramique et le verre. »

L’œuvre joue de la perception intime. Sens et contre sens, transformation du discernement compose l’illusion, préservant le secret d’un procédé de fabrication sophistiqué. L’approche formelle se caractérise par une pureté du vocabulaire. Elle convoque la fragilité et la délicatesse en renouant avec la nature originelle pour ressentir la force des éléments. La transparence du verre évoque l’eau, l’écume et la rugosité celle de la terre. Translucides, colorés, parfois opaques, les éléments sont travaillés dans la profondeur avec des effets d’ombre et de lumière.

Une parfaite lisibilité dans le montage de la forme participe à son attraction particulière pour le mouvement. Chaque pièce adopte des occasions de mutation. Dans un souci constant du matériau et de la texture, Michèle Jarnoux est capable de dynamiser la composition en envisageant toujours la forme comme animée. Ses sculptures pourraient être des diamants tombés des cieux d’un nouveau monde créateur, presque vital.

Caroline Canault Critique d’Art.