La sculpture est une activité artistique qui consiste à concevoir et réaliser des formes en volume, en relief, soit en ronde-bosse (statuaire), en haut-relief, en bas-relief, par modelage, par taille directe, par soudure ou assemblage. Le terme de sculpture désigne également l’objet résultant de cette activité.

Le mot sculpture vient étymologiquement du latin « sculpere » qui signifie « tailler » ou « enlever des morceaux à une pierre »1. Cette définition, qui distingue « sculpture » et « modelage », illustre l’importance donnée à la taille de la pierre dans la civilisation romaine. Au xe siècle, on parle d’« ymagier » et la plupart du temps, le travail du sculpteur est un travail d’équipe avec un maître et des tailleurs de pierre, comme il est traité dans l’art roman et l’architecture romane. Plusieurs équipes travaillent simultanément sur les grands chantiers des cathédrales.

Histoire

Les plus anciennes sculptures réalisées par l’homme et ayant traversé le temps sont de petites figurines rudimentaires taillées, en pierre ou en os2, qui servaient probablement à des pratiques magiques, d’ex-voto, d’échanges, de rituels qui permettaient de réaliser des transactions avec des forces surnaturelles ou sociales. La Vénus de Lespugue, sur ivoire de mammouth, en est un bel exemple. Certaines sculptures de taille plus imposante ont survécu aux millénaires qui nous séparent de leur créateur comme les bisons d’argile crue retrouvés dans la grotte du Tuc d’Audoubert en Ariège, les bas reliefs de l’abri sous roches du Roc-aux-Sorciers dans la Vienne ou les monolithes sculptés de Göbekli Tepe en Turquie. Il est probable que des objets modelés, en terre, ont aussi existé, mais en l’absence de techniques de pérennisation (cuisson), cela reste une hypothèse. D’autres sculptures, comme celles du Roc-aux-Sorciers, représentent des animaux sauvages, sans doute des représentations de l’alimentation des peuples de chasseurs-cueilleurs du Magdalénien.

Techniques

Pour créer une œuvre, plusieurs manières peuvent être envisagées, voire combinées entre elles.

  • Le modelage : L’idée de modelage fait tout de suite penser à la pâte à modeler que l’on travaille si facilement avec les doigts. C’est la technique la plus primitive et la plus directe de mise en forme d’un solide plastique, en l’occurrence la terre ou argile (grès, porcelaine ou faïence). Le modelage en terre n’a cessé d’être pratiqué au fil des siècles. Dans un bon nombre de cas, il a permis au sculpteur de préciser sa pensée. Il a rarement eu un caractère définitif à cause de sa fragilité, mais à partir de la Renaissance, il se voit attribuer un caractère privilégié puisque le sculpteur exécute tous ses modèles en terre et donne à reproduire ses œuvres à des mouleurs, fondeurs ou praticiens (agrandisseurs). Beaucoup d’artistes modernes, en quête de nouveauté, emploient pour leurs créations des matériaux inattendus : des tôles, des pièces métalliques et même des matières plastiques.
    La méthode consiste à ajouter ou retirer de la matière autour d’un ou plusieurs centres qui deviendront « l’âme » de la sculpture. Cette technique du modelage s’applique aux matériaux dits « plastiques », c’est-à-dire susceptibles de se déformer de façon réversible sous l’effet de forces minimes (l’argile, la cire, le plâtre et des pâtes à modeler diverses). À tout moment, de la matière peut être retirée ou ajoutée, les « repentirs » sont permis (jusqu’à un certain point, cependant). La souplesse du matériau permet d’enregistrer les impressions les plus fugitives avec une liberté totale. La limitation principale du matériau réside dans sa résistance souvent assez faible. Le séchage lent de la sculpture est l’étape suivante pour l’argile et le plâtre, le refroidissement pour la cire et la cuisson pour l’argile sèche.
  • La taille, dont le principe est de soustraire, à l’aide d’un outil percuté par un galet (préhistoire) ou une massette, des éclats dans une matière dure pour dégager de sa gangue une forme : il existe deux techniques fondamentales de taille pour sculpter la pierre ou le bois : la taille directe, sans croquis préalable ni modèle et qui tient compte de la forme originelle du bloc pour faire émerger une forme imaginée par le sculpteur, et la taille avec mises aux points, qui recopie fidèlement un modèle à partir de mesures exactes.
  • L’assemblage (voire l’appareillage3) consiste, dans une sculpture, à en assembler les éléments. Cela peut se faire par tenon et mortaise, ou chevilleboulonrivetsoudage , etc.) dans le même matériau ou dans des matériaux différents (la statue chryséléphantine de Zeus à Olympie était en bois, ivoire, or , etc.). Mais il peut s’agir d’objets divers (naturels ou fabriqués, qu’ils soient neufs, vieux, objets du quotidien, etc.). Ces objets peuvent être assemblés avec des parties obtenue par la taille ou d’autres moyens, comme c’est le cas dans certaines sculptures d’Afrique centrale. Toutes ces parties mises ensemble parviennent à former une sculpture unique, dont la somme dépassera la valeur esthétique des éléments séparés.
  • La stéréolithographie, ou prototypage rapide, permet de créer un volume d’après des données informatiques créées ex nihilo ou scannées d’après un modèle réel en trois dimensions4.
  • La sculpture numérique ou virtuelle permet de sculpter un volume virtuel, sans passer par une phase « plan ». Quelques logiciels libres permettent ainsi de modeler un objet virtuel par des fonctions simples permettant d’étirer, creuser, aplatir, lisser, colorer une forme tridimensionnelle, un peu comme on le ferait avec de la pâte à modeler (Sculptris5 par exemple), sur ordinateur. Une imprimante 3D permet éventuellement de la transformer en objet réel.

Techniques

Sculpture moderne

La sculpture moderne et contemporaine utilise encore ces matériaux, mais également le verre et les miroirs, des matériaux bruts, la glace et l’eau, les cristaux liquides et d’autres matériaux fabriqués par l’homme, tels que les matières plastiques, et en particulier les PMMA (polymétacrylate de méthyle) connus sous des noms déposés comme Plexiglas ou Altuglas, ainsi que n’importe quel objet trouvé. Le papier mâché est également un matériau extrêmement économique, et les techniques de réalisation de sculptures avec ce matériau sont simples à mettre en œuvre.

L’utilisation du chocolat n’est pas exclue. Par ailleurs, le monde de la cuisine se plaît à créer ce qui ressemble à de la sculpture, par jeu.

Dans ses derniers écrits, Joan Miró affirmait qu’à l’avenir, on pourrait imaginer des sculptures utilisant les gaz comme matériaux. Lui faisant écho, Louis Leygue, dans son discours de réception de Nicolas Schöffer à l’Académie des beaux-arts, définissait ainsi la sculpture :

« La sculpture peut se réaliser selon trois procédés : celui qui consiste à prélever la matière dans un bloc compact, celui qui consiste à façonner une matière molle pour créer des formes, enfin celui qui consiste à fabriquer ce que l’on veut réaliser. »

On assiste ainsi, avec la multiplication des musées et des publications savantes, à une redécouverte de matériaux oubliés au fil des siècles.

Si certains métaux, comme l’or, ont fasciné les hommes c’est que cette matière jouait avec la lumière. Le poli idéal que recherchait Brancusi se joue aussi de la lumière dans les photographies qu’il a réalisées de ses propres sculptures9. La lumière est une qualité de certains « matériaux ». De même, lorsqu’un sculpteur réalise une fontaine, l’eau est partie prenante des « matériaux » avec lequel il doit travailler, et même le mouvement qui est donné à l’eau. Le mouvement est alors une qualité du matériau « eau ». Jean Tinguely a su introduire le rapport entre ses assemblages d’objets de rebut, leurs mouvements heurtés et l’eau en mouvement avec les sons que la sculpture produit.

Après László Moholy-Nagy (Modulateur Espace Lumière, 192910), Nicolas Schöffer et bien d’autres artistes tels Marta Pan, ont été intéressés par les rapports de l’architecture et de la sculpture. Les deux premiers considérant la lumière comme un matériau autant que le mouvement. Marta Pan a réalisé ainsi des sculptures monumentales intégrées dans l’architecture des espaces publics et urbains, comme La Perspective dans le parc des Sources de la Bièvre à Guyancourt11. Nicolas Schöffer souhaitait réaliser une « Tour Lumière Cybernétique » en 1963, en interaction avec le quartier de La Défense, à Paris. L’espace, dont la qualité est d’être habité, pour Nicolas Schöffer, est un matériau au même titre que le mouvement qui anime ses sculptures12.

Photographie de Spiral Jetty, le 11 janvier 2004, à 7 h du matin. Le basalte y apparait d’autant plus noir.

Les artistes du Land art ont, pour leur part, souhaité sortir des galeries d’art et des musées, avec les conventions et contraintes que cela supposait, tout en réalisant ou en nous montrant des « sculptures » qui rompent avec les traditions récentes. Les « matériaux » sont, ici, nombreux : matériaux naturels, comme la spirale en remblai de basalte / le Grand Lac Salé, dans Spiral Jetty de Robert Smithson (1970) où la dimension du temps est essentielle. Tandis que pour James Turrell, c’est encore la lumière, naturelle, dans des espaces généralement construits en pleine nature (le Roden Crater). L’échelle, souvent monumentale de ces sculptures, prend en compte le paysage où les œuvres s’inscrivent, et la dimension temporelle sur de longues durées : la spirale, en basalte noir, de Robert Smithson, était pensée comme soumise aux fluctuations du lac, la spirale noire se borde alors de sel blanc, jusqu’à sa disparition dans les eaux salées, pendant les périodes de hautes-eaux, et sa réapparition, toute blanche, quelques années plus tard.